Poils sur toile

Rosa et Nathalie marchaient d’un pas lent et ferme dans les allées parfumées par les roses épanouies, en cette période estivale, du jardin de Cimiez. Rosa s’arrêta devant un rosier et dit :

- Et si je peignais l’infiniment petit ? Observez cette fourmi allant rejoindre sa communauté…

- Je ne vous vois pas peindre ce type d’animal. Ce n’est pas assez viril et musclé, enfin, vous m’avez comprise. Et puis vos acheteurs ne comprendraient pas.

- Ah… et ce scarabée bousier. Regardez-le en train de pousser sa crotte. Il a de belles carapaces et il doit être sacrément fort pour pousser sa boule qui doit peser des centaines de fois son poids.

- Non, franchement Rosa, je comprends que vous vouliez innover mais de là à peindre des insectes, non. Je pense que le public n’est pas encore prêt. Et puis vous allez vous abîmer les yeux en les observant de plus près. Surtout que nous attendons toujours la réception de votre nouvelle loupe.

- Oui, vous avez raison, très chère. Et que pensez-vous de ces trois chiens en liberté qui courent partout après ces papillons jaunes. Regardez comme ils sont robustes. Qu’en dîtes-vous ?

- Ah.. je vous retrouve là, très chère et partage votre choix.

- Regardez ces cuisses si fermes, si puissantes. Je pourrai en faire un et pense que cela plaira à Gambart.

- Certes. Et pourtant leurs pas semblent si légers, si élégants alors qu’ils doivent bien peser 12 kg… Il y a de la masse musculaire, c’est flagrant !

- Leur robe tachetée noir et blanc apportera de la modernité à mes tableaux, jusqu’à présent ciblé plutôt sur des robes uniformes.

- Oui, mais Chérie, vos acheteurs aiment déjà ce que vous faîtes, vous n’avez pas besoin d’innover.

- J’ai 40 ans, et j’ai envie d’innover. J’en ai assez des chevaux, des vaches et même des lions. Alors vive les bouledogues français par Rosa Bonheur !